“L’Europe est devenue un empire”

Viktor Orban n’a pas fini de faire parler de lui. A 50 ans, le Premier ministre hongrois irrite autant qu’il intrigue. A la fois libéral et dirigiste, pourfendeur des avantages sociaux mais capable de taxer les multinationales étrangères, il modifie plusieurs fois la Constitution, fait référence aux racines chrétiennes et à l’histoire millénaire de la Hongrie, accorde la nationalité à plus de 3 millions de Hongrois habitant dans les pays limitrophes, multiplie les lois, combat l’héritage socialiste, accroît l’emprise de son parti. Le tout mené tambour battant, au grand dam de la gauche européenne. De quoi s’expliquer à L’Express, en toute franchise.

Certains vous surnomment Viktator, d’autres vous comparent à Poutine, à Chavez, à Ceausescu, voire à Mussolini. Comment assumez-vous une telle impopularité?

J’espère recevoir un jour de meilleurs surnoms. Quant à l’impopularité, j’y suis habitué depuis un certain temps. Je me souviens qu’en 1988, quand j’ai créé mon propre mouvement, devenu le Fidesz, j’ai dû essuyer les pires attaques, car ce mouvement était radicalement anticommuniste à une époque où le pouvoir était aligné sur l’Union soviétique. Etre détesté est mon lot et je m’en accommode très bien. J’ai été le plus jeune Premier ministre d’Europe en 1998, à l’âge de 35 ans. J’ai eu droit à tous les compliments et, à dire vrai, la politique à suivre était alors simple : compte tenu du retard de la Hongrie, il suffisait de dire qu’on allait copier tout ce qui se faisait en Europe de l’Ouest. Cette idée m’enthousiasmait. Puis j’ai perdu les élections, en 2002, et je suis revenu aux affaires huit ans plus tard dans une Europe dont la situation avait complètement changé. Aujourd’hui, la fainéantise intellectuelle qui consiste à imiter l’Europe occidentale n’apporte plus de réponse à nos problèmes: il nous faut trouver des approches nouvelles et des solutions innovatrices. Or c’est en ouvrant des chemins différents que je rencontre le plus d’incompréhension de la part de nos partenaires européens. Je n’ai rien à dire sur les politiques suivies en France, en Allemagne ou en Grèce, mais je veux agir autrement. Cette différenciation apparaît en elle-même comme une critique de ce qui est effectué par ailleurs; c’est ce qui me vaut tant de diatribes.

L’express

 

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